« Asyel ! Viens ici un instant ! »
Le petit aux cheveux foncés avait quitté sa « cachette » qui laissait clairement entrevoir sa silhouette à travers les barreaux de l’escalier se dirigeant vers son père.
« Voici la jeune demoiselle qui sera dorénavant ta grande sœur, Aya ! Traites-la avec le plus grand respect ! Elle est à partir d'aujourd'hui une Tsubaki tout comme toi. »
Le père tenait le garçon par les épaules le poussant quelques peu pour qu'il se rapproche de la jeune fille qui se tenait devant lui.Asyel avait sur l'instant, été subjugué par la longe chevelure rousse de la charmante demoiselle.
« Aya, voici mon fils, Asyel ! Il te tiendra compagnie à présent dans cette grande maison ! »
Le garçon s'était alors essayé à des salutations plus qu'hésitante :
« Yo...yo... yoroshiku one... onegaishimasu ! »
A peine la phrase s'était-elle enfuit de ses lèvres qu'il s'était caché derrière la figure paternel. Il ne détournait pourtant pas le regard de celle qui portait dorénavant le nom d’Aya Tsubaki.
Aya : Étonnée par la timidité du dénommé Asyel, la petite fille se rapprocha de lui avant de lui offrir un magnifique sourire.
En un instant, le petit avait rougis aussi vif que la chevelure d’Aya :
« Nee-san… » Avait-t-il murmuré.
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
C’est ainsi que, par une nuit d’été, la vie du fils unique Tsubaki avait été bouleversée. La famille se composait à présent du père, PDG d’une entreprise d’import/ export florissante, sa femme, cadre dans un laboratoire pharmaceutique, d’Asyel et d’Aya. Les premiers mois furent très différents de ce à quoi il était habitué. Les nombreux professeurs avaient été congédiés durant quelques mois pour laisser place à la mère de famille qui avait cessé toute activité professionnelle dans le but d’inculquer le savoir nécessaire aux petits. Bien sur, tous les apprentissages de bienséance et d’étique avait été mis en suspend avec son arrivée. Les parents pensaient surement qu’elle avait besoin de temps et d’amour et ce, malgré son sourire éternelle. Asyel quand à lui, était là en observateur. Au fond, il était reconnaissant. Depuis son arrivée, son père semblait s’être quelque peu adoucit tandis que sa mère, elle, était bien plus présente. Les mois défilèrent laissant place à quelques progrès. Le petit brun timide, dont on pouvait facilement définir la position dans la maison à l'époque : toujours à l’extrême opposé de la petite rousse énergique, se tenait à présent derrière elle et ce à tout instant. Les « Nee-san » murmurés il y a quelques mois étaient prononcés sans la moindre hésitation et donnaient un peu de vie dans la grande maison blanche.
Quelques années plus tard, alors qu’une fête se déroulait chez eux, Asyel s’était éclipsé dans le jardin pour admirer les différentes fleurs qui s’y trouvaient.
« C’est là que tu étais ! » s’était exclamée la mère de famille avant de s’approcher de son fils.
Ce dernier lui avait sourit presque immédiatement avant de reporter son regard à nouveau sur les fleurs.
« Tsubaki no hana… tout comme le nom de notre famille… »
La femme s’était approchée de l’arbuste où se mêlaient les camélias blancs avec les rouges. Du bout des mains elle cueillit une de chaque avant de retourner auprès de son fils. Elle lui tandis alors le camélia rouge, qu’il prit, tandis qu’elle, fixait le blanc qu’elle tenait entre ses doigts :
« Asyel, vois tu ? Ce camélia blanc… c’est toi ! » Elle souriait.
« Hum … le rouge c’est donc Nee- san ? »
Ne sachant trop quoi répondre elle eut un rire léger :
« Pourquoi dis tu cela ? »
Le petit semblait réfléchir, comme il le faisait lorsque sa mère leur donnait un problème à résoudre :
« La couleur de la fleur est la même que celle des cheveux de Nee-san ! »
Elle sourit tristement :
« Je vois… . Asyel ? Je te confie celle là alors – elle passa doucement sa main dans les cheveux de son fils – Protèges-là ! »
Le petit semblait confus :
« Nee-san … ou la fleur ? »
« Les deux mon fils… les deux. Comme dans cet arbuste … là où un camélia rouge fleuri, un blanc se doit d’être à ses cotés ! » Finit –elle en souriant à l’enfant de dix printemps qui se tenait devant elle.
« Allez viens ! Ton père et ta sœur nous attendent pour le discours ! »
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Les convives s’étaient rassemblés dans la salle des fêtes. Aya se tenait aux cotés de son père devant tous et après qu’Asyel et sa mère les aient rejoins, le chef de famille prononçât son discours annonçant par la même, l’expansion de l’entreprise suite à un chiffre d’affaire record établit durant l’année passée. C’est à ce moment précis qu’un homme, animé par la boisson, saisit une bouteille de vin pour l’envoyer au visage du PDG. Malheureusement, ce ne fut pas ce dernier qui se trouvât sur la trajectoire du projectile mais Aya qui se tenait non loin de là. Tout se passa si vite ; On entendit le verre se briser. L’instant d’après, Aya se trouvait dans les bras de son père qui avait voulut la protéger. Mais aucune trace de verre ni du liquide qui devait s’y trouver et qui se serait naturellement répandu sur les vêtements de l’homme d’affaire. Le cri de leur mère retentit alors dans la salle voyant Asyel se tenir le visage et la marre de vin (sang ?) répandu à ses pied. Effrayé, sans comprendre pourquoi, le garçon se mit à courir rejoignant sa chambre à la hâte. Il ferma à clé derrière lui. Il était à bout de souffle : la peur, la douleur, la course et le cri de sa mère faisait battre ce pauvre cœur bien plus vite qu’il ne le pouvait. S’étant déplacé devant la glace, il vit la plaie béante d’où jaillissait le sang. Le garçon était sur le point de s’évanouir lorsque son attention se porta sur la plaie qui semblait se refermer : en effet cette dernière se referma au bout de quelques minutes comme si de rien n’était, ne laissant même pas une cicatrice pour témoin :
« Asyel ! Asyel ! Ouvres cette porte tout de suite ! N’ais pas peur ! C’est fini ! »
La voix paternelle se faisait entendre derrière la porte en bois où se mêlait, inquiétude, colère et tristesse. Après un instant d’hésitation, il se décida à ouvrir :
« J’ouvre Oto-san… »
Il débloqua la porte mais à peine eut-il posé sa main sur la poignée que le petit perdit conscience, s’écroulant sur le sol.
Puis le garçon se sentit porté pendant qu’il entendait encore la voix de son père pour finalement sombrer dans un sommeil profond :
« Edouard ! La trousse de secours ! Vite ! »
Les festivités dans la demeure Tsubaki avaient fait parler d’elles : une soirée tenue par l’un des jeunes entrepreneurs émergeant les plus connus du pays où deux bouteilles de vins se voyaient brisées sur un crâne au lieu d’être bues, était un pur délice pour les journalistes. Ce n’est que par la suite qu’Asyel entendit de la bouche d’Aya que, suite à ce qui s’était produit, leur mère, prise de rage, avait saisit une bouteille à son tour, la fracassant sur le crâne du frère de son mari. Ce dernier, jaloux de la réussite familiale au défaut de celle son entreprise concurrente qui avait mis la clé sous la porte le mois d’avant s’était laissé aller à la boisson et était à l’origine de l’envolée du projectile.
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Le mystère du « sang-sans-plaie » était à présent une anecdote bien connu de la petite famille et de leur personnel. Elle faisait rire certain, sourire simplement pour d’autres et il y avait ceux qui gardait le silence. Asyel, lui, en avait gardé un souvenir ineffaçable. Il n’avait pas rêvé. Et pour preuve, il en était venu à se blesser lui-même constatant une nouvelle fois de ses propres yeux, le miracle incompréhensible qui opérait à l’intérieur de son corps. Ce jour là, il avait alors fixé le camélia rouge qui avait perdu de son éclat entre les pages de son livre sur le corps humain :
« Je la protégerais Oka-san… avec ce corps, je peux le faire. »
Plusieurs années s’étaient écoulées depuis. Le jeune homme se remémorait cette promesse, à l’entrée du pensionnat Black Rose où était à présent sa sœur, une lettre de recommandation en main. Elle venait de la part d'un homme qui aurait été professeur d'anglais en ces murs et qui était présent lors de la fête parental où il avait prit conscience de sa "particularité". " ...Cet établissement est fait pour vous ! ". La lettre se terminait ainsi. Asyel avait été plus que sceptique en lisant mais toutes ses préoccupations concernant la missive s'étaient envolés au moment où avait relus le nom du pensionnat. Quel genre d’établissement était-ce ? Que voulait dire l'homme en question par " fait pour vous ! " ? Ces questions trouveraient certainement réponses ici.
Il prit une grande inspiration, calmant ainsi ses jambes flageolantes et enclencha le pas vers le bâtiment principal…